Caractérisation multiparamétrique des neurones du hilus du gyrus denté chez la souris.
Clémence Leclerc, doctorante - PhD student Crédits : ESPCI ParisTech
Le gyrus denté fait partie de la formation hippocampique et joue un rôle clé notamment dans le traitement des informations spatiales et les processus mnésiques. Il est également l’une des rares régions cérébrales où la neurogénèse a lieu de manière constitutive chez le mammifère adulte.
Le gyrus denté est composé de nombreux types neuronaux. Les cellules granulaires confinées dans la couche granulaire ainsi que les cellules moussues du hilus sont les principales cellules glutamatergiques du gyrus denté et sont relativement homogènes de part leur propriétés intrinsèques. Le hilus est également peuplé d’interneurones GABAergiques qui se caractérisent par leur grande diversité. Ces interneurones représentent des acteurs cruciaux dans la balance excitation/inhibition du réseau hippocampique et ils sont impliqués dans diverses conditions neuropathologiques telles que l’épilepsie, la maladie d’Alzheimer, l’ischémie, le traumatisme crânien, le stress chronique… Cependant, de part leur hétérogénité, ces interneurones restent assez peu décrits et les corrélations entre les classifications existantes sont difficiles à établir. Une meilleure connaissance des populations neuronales qui composent le hilus devrait contribuer à éclaircir leurs rôles spécifiques.
Nous nous sommes tout d’abord intéressés à la localisation et la répartition dans le hilus des interneurones GABAergiques par rapport aux neurones glutamatergiques. Pour ce faire nous avons utilisé des souris transgéniques GAD67-GFP et évalué les densités de neurones exprimant la GFP parmi la population neuronale totale visualisée grâce à des immunomarquages de NeuN (Neuronal Nuclei Antigen). D’autres immunomarquages nous ont permis de mesurer dans le hilus et la couche granulaire du gyrus denté les densités de marqueurs classiques d’interneurones : Calretinine (CR), Parvalbumine (PV), Somatostatine (SOM), Neuropeptide Y (NPY), Oxyde Nitrique Synthétase 1 (NOS1) et Peptide Vasoactif Intestinal (VIP). En outre, pour compléter cette caractérisation des interneurones, leurs propriétés électrophysiologiques, moléculaires et morphologiques ont été étudiées individuellement. L’approche utilisée est la RT-PCR en multiplex sur cellule unique après enregistrements électrophysiologiques en patch-clamp et injection de biocytine chez des souris C57Bl6 âgées de 2 à 3 mois. Les marqueurs analysés par RT-PCR sont identiques à ceux étudiés en immunomarquages. Une analyse non supervisée en clusters, prenant en compte les paramètres électrophysiologiques et moléculaires, a fait ressortir la prééminence de deux grands types cellulaires : les neurones glutamatergiques vs les interneurones GABAergiques, eux-même divisés par la suite en trois clusters. En améliorant notre connaissance de la diversité des interneurones du hilus du gyrus denté chez la souris adulte, cette étude servira de base pour de futurs travaux s’intéressant à leur rôle physiologique, par exemple dans la maturation et la survie des neurones nouvellement générés, ou à leur implication dans des neuropathologies.
En parallèle nous avons mené, en collaboration avec Claire Rampon (Centre de Recherches sur la Cognition Animale), un projet visant à stimuler la production de nouveaux neurones dans l’hippocampe de souris. Pour cela des souris ont reçu une injection intra-hippocampique d’un rétrovirus dirigeant l’expression de eGFP (enhanced Green Fluorescent Protein) et du facteur de transcription proneural NeuroD1. Les résultats obtenus au CRCA sur ce projet montrent que la transduction de ce retrovirus dans les nouvelles cellules de l’hippocampe conduit à leur maturation en neurone, et accélère leur développement morphologique. Il était primordial de vérifier que les neurones transduits marqués par la GFP, et sur-exprimant NeuroD1, possèdent des caractéristiques électrophysiologiques de neurones fonctionnels.
Nous avons montré que ces neurones NeuroD1-GFP+ sont capables d’émettre des potentiels d’action, et ce plus précocément que des neurones ne sur-exprimant pas NeuroD1, et de recevoir des afférences GABAergiques et glutamatergiques. Les neurones NeuroD1-GFP+ sont donc fonctionnels et bien intégrés au réseau hippocampique.
Ces avancées pourraient permettre d’envisager de nouvelles approches thérapeutiques dans les pathologies affectant la neurogénèse hippocampique.