Deux études successives portées par le laboratoire Physique pour la Médecine Paris (ESPCI Paris-PSL, Inserm, CNRS) soulignent les avancées en imagerie ultrasonore 3D non invasive, en permettant d’observer le flux sanguin en temps réel dans deux organes entiers : le cœur et le cerveau.
Ces travaux ont été publiés dans JACC Cardiovascular Imaging et en couverture de eBioMedicine.
Alexandre Dizeux, Physique pour la Médecine Paris
Les organes sont alimentés par un réseau complexe de vaisseaux sanguins, essentiels à leur bon fonctionnement. Certaines techniques d’imagerie donnent un aperçu global de ce réseau vasculaire, mais pour la première fois une imagerie 3D ultrarapide permet d’observer les flux sanguin des grosses artères jusqu’aux plus petits vaisseaux sanguins de seulement quelques micromètres de diamètre.
Depuis plusieurs années, le laboratoire Physique pour la Médecine Paris est un des leaders mondiaux en matière d’imagerie par ultrasons, non invasive et non ionisante. Ce laboratoire a accompli des avancées majeures en imagerie vasculaire au cours des dix dernières années, avec la mise au point de l’imagerie Doppler ultrasensible (uDoppler) et l’imagerie fonctionnelle ultrasonore (fUS) puis la microscopie de localisation ultrasonore (ULM) en 2D. La technologie est licenciée à la société Iconeus (start-up issue des travaux du laboratoire) dans le domaine de l’imagerie cérébrale, où elle trouve déjà de nombreuses applications pour la recherche en neurosciences. Les chercheurs de Physique pour la Médecine Paris viennent tout juste de remporter une nouvelle victoire en déployant l’ULM en 3D : grâce à l’aspect tridimensionnel, les chercheurs ont obtenu des images super-résolues du cœur et du cerveau de rongeur, à l’échelle de l’organe entier.
Pour atteindre une telle prouesse à des résolutions aussi fines, les scientifiques injectent des microbulles de gaz biocompatibles, dont la position est suivie à haute cadence d’imagerie. Il est ainsi possible de remonter aux informations détaillées sur le débit sanguin, la taille des canaux, et donc reconstituer l’activité vasculaire complète de l’organe. Outre les connaissances fondamentales sur le fonctionnement des organes, cette technique pourrait également fournir de précieuses informations sur différentes pathologies cardiovasculaires, voire mesurer l’efficacité de différents traitements.
Un défi technologique
Pour parvenir à ces résultats, l’équipe a dû relever plusieurs défis technologiques. Pour le cœur par exemple, il a fallu trouver la fenêtre de mesure idéale pour pouvoir corriger sur l’image les mouvements liés à la respiration et aux battements cardiaques. Pour le cerveau, il peut être nécessaire d’implémenter des algorithmes de post-traitement pour corriger les distorsions de signal induites par la boîte crânienne. Par ailleurs, le passage de l’imagerie 2D l’imagerie 3D implique une augmentation énorme des volumes de données collectées : pour une minute d’acquisition, le volume de données à traiter dépasse le terra-octet d’informations.
Avant d’envisager un passage en clinique chez l’humain, les scientifiques vont encore améliorer leur technologie, en optimisant à la fois les capteurs, les électroniques et les méthodes de traitement de données. Mais l’équipe est confiante : le principe scientifique de microscopie ultrasonore 3D et sa faisabilité technique sont démontrés.
Publications associées :
Demeulenaere O, Sandoval Z, Mateo P, Dizeux A, Villemain O, Gallet R, Ghaleh B, Deffieux T, Demené C, Tanter M, Papadacci C, Pernot M. Coronary Flow Assessment Using 3-Dimensional Ultrafast Ultrasound Localization Microscopy. JACC : Cardiovascular Imaging 2022:16.
Demeulenaere O*, Bertolo A*, Pezet S, Ialy-Radio N, Osmanski B, Papadacci C, Tanter M, Deffieux T**, Pernot M**. In vivo whole brain microvascular imaging in mice using transcranial 3D Ultrasound Localization Microscopy 2022 ;79:12.
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Corresponding author : mathieu.pernot@espci.psl.eu
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